Le prix Nobel de la paix 2021 a été attribué aux journalistes Maria Ressa et Dmitri Muratov pour leurs engagements dans la lutte de la liberté d’expression aux Philippines et en Russie, a annoncé, vendredi, le comité Nobel norvégien à Oslo où la cérémonie s’est déroulée.
Le comité a attribué le prix qui pour certains est le plus prestigieux dans la matinée du vendredi 8 octobre, à la Philippine Maria Ressa et au Russe Dimitri Muratov.
Dans son discours de circonstance, la présidente du comité Nobel, Berit Reiss-Andersen a souligné ce qui suit:
Maria Ressa et Dimitri Muratov
“sont les représentants de tous les journalistes qui défendent cet idéal dans un monde où la démocratie et la liberté de la presse sont confrontées à des conditions de plus en plus défavorables”.
Dimitri Muratov de son côté en a profité pour dédier son sacre à Anna Politkovskaïa. Âgé de 59 ans, il est l’un des fondateurs et rédacteur en chef du journal russe Novaïa Gazeta, cette dernière qui « a depuis des décennies défendu la liberté d’expression en Russie dans des conditions de plus en plus difficiles »
a souligné le jury.
Le lauréat a dit dédier son prix à Novaïa Gazeta et à ses collaborateurs assassinés pour leur travail et leurs enquêtes. “Ce n’est pas mon mérite personnel. C’est celui de Novaïa Gazeta. C’est celui de ceux qui sont morts en défendant le droit des gens à la liberté d’expression”, cité par l’agence de presse publique TASS, et listant les noms des six journalistes et contributeurs au journal assassinés, dont Anna Politkovskaïa.
Régulièrement victime de menaces et de pressions, Novaïa Gazeta a vu six de ses collaborateurs être tués, dont Anna Politkovskaïa, assassinée il y a 15 ans quasiment jour pour jour.
Ce qui pour plus d’un parait paradoxal, c’est quand le Kremlin a salué vendredi le “courage” et le “talent” de Dmitri Mouratov, après son prix pour son combat en faveur de la liberté d’expression. “Nous pouvons féliciter Dmitri Mouratov. Il travaille en continu en suivant ses idéaux, en les conservant. Il est talentueux et courageux”, a déclaré aux journalistes le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov.
Le courage de Maria Ressa face à l’autoritarisme de Rodrigo Duterte
Quant à Maria Ressa (58 ans), avec son média d’investigation Rappler cofondé en 2012, “elle utilise la liberté d’expression pour exposer les abus de pouvoir et l’autoritarisme croissant dans son pays natal, les Philippines”, dirigé par Rodrigo Duterte, a salué le jury du Nobel.
La journaliste critique du président philippin a exprimé son “choc” à l’annonce du prix et a assuré que Rappler “ne fera que continuer à faire ce que nous faisons”.
“Nos droits et notre démocratie sont en jeu”, affirme la journaliste philippine Maria. L’attribution du Nobel de la paix à des journalistes prouve que “rien n’est possible sans les faits”, a réagi vendredi la co-lauréate du prix. “Un monde sans faits signifie un monde sans vérité et sans confiance”, a-t-elle ajouté lors d’un entretien diffusé en direct sur Rappler.
Maria Ressa et Rappler ont fait l’objet de plusieurs poursuites judiciaires et enquêtes après avoir publié des articles critiques envers les politiques du gouvernement Duterte, notamment sa guerre contre la drogue. L’ancienne correspondante de CNN est aujourd’hui en liberté provisoire, en attendant le jugement en appel dans une affaire de diffamation.
Elle a reçu en avril le prix de la liberté de la presse décerné par l’Unesco en reconnaissance de son “combat infaillible pour la liberté d’expression”.
Aussi, nous devons souligner que l’année dernière, le Nobel de la paix avait récompensé le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies pour ses efforts contre la faim dans le monde.
Après la remise du prix de paix aujourd’hui et est le seul Nobel remis à Oslo, la saison des prix décernés depuis 1901 s’achève, lundi, à Stockholm, avec l’économie.