Historicité de la Coopérative
Lors du XXXIe congrès de la Déclaration sur l’identité coopérative donné en 1995. l’ACI, l’association qui représente les coopératives à l’échelle mondiale, définit une coopérative comme une « Association autonome de personnes volontairement réunies pour satisfaire leurs aspirations et besoins économiques, sociaux et culturels communs au moyen d’une entreprise dont la propriété est collective et où le pouvoir est exercé démocratiquement. » (ACI, 1995).
L’ACI est une entreprise « centrée sur les personnes », qui se veut être une alternative à l’économie capitaliste. Les objectifs de la coopérative sont à la fois économiques, politiques et sociaux (Guillaume Hébert, Rémy-Paulin Twahirwa, 2019, p. 7). L’identité coopérative selon l’ACI repose sur l’adhésion à des principes et des valeurs qui guident l’action de ces entreprises. Au nombre de sept, les principes sont listés comme suit par l’Alliance :
- L’adhésion volontaire et ouverte à tous ;
- Le contrôle démocratique exercé par les membres ;
- La participation économique des membres ;
- L’autonomie et l’indépendance ;
- L’éducation, la formation et l’information ;
- La coopération entre les coopératives ;
- L’engagement envers la collectivité.
Les principes coopératifs ont été formulés pour la première fois par l’ACI en 1937, puis révisés à deux reprises, d’abord en 1966 puis en 1995.
Les Coopératives : histoire d’une entreprise sociale et solidaire
L’histoire du mouvement coopératif moderne s’amorce en réponse aux ravages sociaux causés par le capitalisme industriel au XIXe siècle. En Europe, les populations subissent alors les conséquences des transformations sociales et économiques qui accompagnent les avancées technologiques de la révolution industrielle. Elles sont arrachées à un mode de vie traditionnel, quittent mas- sivement les campagnes et s’entassent dans les grandes villes insalubres où se concentrent les travailleurs et les travailleuses requis par les nouveaux modes de production. Les conditions de vie et de travail sont misérables et c’est dans ce contexte que naissent de nouvelles idées et de nouveaux mouvements visant à contrer l’oppression sociale et économique vécue par la majorité.
À cette époque, différentes expériences inspirées de penseurs socialistes et axées sur la coopération sociale et économique se développent un peu partout. Parmi ces penseurs, on trouve Robert Owen, un Gallois ayant fait fortune dans l’industrie des textiles et qui souhaite améliorer la vie des ouvriers. Il devient l’une des figures qu’on désigne comme « socialistes utopiques », et qui appartiennent à un courant idéologique qui cherche à définir les conditions morales et économiques permettant une vie harmonieuse au sein de communautés humaines.
La plupart de ces penseurs croient que cette harmonie est atteignable à une échelle plus restreinte que celle des grandes cités industrielles qui se développent. Des expériences de vie communautaire seront faites en ce sens dans des régions retirées d’Europe ou d’Amérique du Nord.
Une coopérative fondée en 1844 en Angleterre par les «Pionniers de Rochdale » deviendra une icône du mouvement coopératif. Vingt-huit tisserands du Lancaster mettent sur pied un magasin de coopérative d’approvisionnement qui deviendra, au sens où on l’entend aujourd’hui, une « coopérative de consommateurs ».
L’histoire a retenu la date de 1844 pour parler d’un mouvement coopératif moderne, organisé. En effet, il y avait 28 artisans qui travaillaient dans la filature de coton dans la ville de Rochdale dans le nord de l’Angleterre qui se mettaient ensemble et créaient une entreprise coopérative moderne. On a retenu cette date et ce mouvement parce que c’est grâce à de cette entreprise que les valeurs coopératives commencent à prendre naissance , car la coopérative est basée sur l’honnêteté.
Le mouvement coopératif a vu le jour en Haïti pour la première fois à Source Chaude par Elie Mélec Vernet, dans le secteur agricole en 1937 tandis qu’on a eu notre première caisse d’épargne et de crédit en 1946 dans la vallée de Jacmel avec les frères de l’Instruction Chrétienne.
Quelques dates Historiques du Mouvement Coopératif Haïti.
● 1937 : Elimélec Vernet fonda la première Coopérative moderne, à Source chaude, commune d’Anse-rouge, Haut-Artibonite, elle était à vocation agricole.
● 1939 : Élaboration de la première loi sur les Coopératives.
● Septembre 1946 : Fondation de la Caisse Populaire Petite Épargne de la Vallée de Jacmel « CAPPEV », par les frères de FIC.
● 1948 : Fondation de la Caisse Populaire de Cavaillon « CAPUC »
● 1949 : Fondation de la Caisse Populaire des Cayes « CPC » par les prêtres Oblat
● 1949 : Fondation de la Caisse Populaire Sainte-Anne de Camp-Perrin « CAPOSAC »
● 1951 : Fondation de la Caisse Populaire Sainte-Anne de Port-au-Prince « CPSA »
● 1953 : Loi donnant création au Conseil National des Coopératives.
● 31 Mars 1981 : Publication du décret organique du CNC
● 2 Avril 1981 : Décret adopté sur les Coopératives et les CP en Haïti (Toujours en vigueur pour les Coopératives Non financières)
● 1995 : Début de professionnalisation des CEC par le projet « Revitalisation du Mouvement Coopératif Haïtien (RMCH) »
● 1998 : Fondation de l’Association Nationale des Caisses Populaires Haïtiennes « ANACAPH »
Actuellement le Conseil National des Coopératives ( CNC) enregistre plus de 300 coopératives de production agricole, artisanale, artistique, de pêche, de transformation, de distribution, de commercialisation et de métiers.
Comme l’exprime Philippe Chanial (2003), ce courant idéologique avait pour ambition d’intégrer les valeurs de solidarité et de citoyenneté au sein de la sphère économique, héritage théorique dont les origines de l’esprit coopératif vont s’inspirer. Cela s’est notamment traduit par l’émergence des toutes premières formes de coopératives « modernes ». Rares sont les travaux traitant de la naissance du fait coopératif qui n’aborde pas la Société équitable des pionniers de Rochdale. Fondée en 1844 au Royaume-Uni, cette première coopérative de consommateurs regroupait l’activité de 28 tisserands (Draperi, 2007, p. 68). L’importance de cette structure dans l’histoire coopérative tient du fait qu’elle est l’une des premières à avoir d’une part, perdurée dans le temps et d’autre part, à avoir mis à l’écrit ses principes (Battilani et Schröter, 2012, p. 4). Les règles de justice, d’égalité, de liberté et d’équité qui formaient les assises des pionniers de Rochdale représentent toujours les piliers de l’esprit coopératif tels qu’ils ont été formulés par l’ACI (Espagne, 2008, p. 2).
Le secteur coopératif qui rassemble aujourd’hui plus de 800 millions de personnes à travers le monde (Gagnon et al., 2001) est ainsi né dans l’Europe du XIXe siècle en réponse aux effets néfastes du capitalisme industriel et se diffuse assez rapidement à travers le monde par la suite. En Afrique, Guillaume Hébert et Rémy-Paulin Twahirwa établissent, avec justesse, un lien entre la conception essentiellement relationnelle de l’existence humaine portée par la philosophie Ubuntu et les formes liminaires de coopératives africaines (2019). Les idées coopératives basées sur le modèle européen franchissent les frontières du continent africain à partir du XXe siècle.
La Coopérative est l’une des voies à prendre pour le développement économique et social en Haïti en se serrant les coudes pour un seul but commun. La Coopérative n’est pas seulement un mouvement collectif mais également un modèle économique et d’association dans la société pour un développement durable dans le pays. Le domaine de la coopérative embrasse plusieurs secteurs comme la transformation, la producrtion et les services. Le mouvement coopératif, se rapportant surtout à la production agricole, nous offre la possibilité d’avoir un développement social, économique et environnemental plus stable.
Jean Camille BISSERETH
Président du Conseil d’administration et Directeur Exécutif du CEHPAPE