Dans une entrevue avec le journal La Tribune, Francis Perrin, directeur de recherche à l’IRIS (Paris) et chercheur associé au Policy Center for the New South (Rabat), il a commenté en sa qualité d’expert sur les conséquences du remplacement des acheteurs des produits pétroliers Russe.
La décision de cesser à moyen terme les importations de gaz et de pétrole russes va redessiner les marchés des hydrocarbures sans doutes, mais Francis a fait le point.
Quelles conséquences pour les marchés mondiaux?
LT- Peut-on se passer du gaz et du pétrole russe?
FP- Pour l’Europe, la réponse est non à court terme. Pour les Etats-Unis, la réponse est oui. Le président Joe Biden a décidé un embargo le 8 mars sur le pétrole, les produits raffinés, le gaz et le charbon russes car les Etats-Unis sont une grande puissance énergétique en termes de production d’énergies fossiles. Ils sont le premier producteur mondial de pétrole et de gaz naturel. Leur dépendance à la Russie est faible. L’Union européenne (UE) n’est pas une zone importante de production d’énergies fossiles. En 2020-2021, 45% de ses importations de gaz, 47% de celles de charbon, et de 25% à 30% de celles de pétrole venaient de Russie. C’est pourquoi les dirigeants européens ne sont pas désireux d’imposer un embargo à effet immédiat ou à très court terme sur ces importations car il n’y aurait pas de solution de remplacement. Mais la situation change considérablement, comme souvent dans le domaine de l’énergie, si l’on considère un autre calendrier. Dans une vision à moyen terme, ce n’est plus mission impossible. D’où la décision prise par l’UE d’agir sur deux temporalités différentes. En un an, on va réduire significativement nos importations de gaz russe sans les supprimer, et sur cinq ans, le but est de se passer complètement du pétrole et du gaz russes.
Si on peut se fier aux analyses de Francis Perrin, les Américains peuvent conserver leur calme si toutefois la Russie aurait voulu changer de marché.